Pendant plusieurs siècles, les cultures des différents peuples qui ont vécu sur cette île, plus récemment des défrichements provoqués par l'expansion des exploitations de café et de cacao et plus tard d'agrumes et de bananes ont rogné sur cette immense forêt que Christophe Colomb et ses équipages eurent bien du mal à pénétrer.
Le 20 février 1989 naissait le Parc National de la Guadeloupe occupant la plus grand part du relief de la Basse-Terre. Cette décision puis la gestion de ce patrimoine ont permis de sauver cette région forestière ainsi que les zones côtières et les îlets rattachés au Parc, des conséquences dues au manque de clairvoyance ou de scrupules de personnes que la société de consommation aveugle...
“Forêt de la pluie”, la forêt hygrophile, forêt primaire la plus importante des petites Antilles occupe une place prépondérante en altitude et dans le Parc National de la Guadeloupe.
Les “géants” aux essences les plus connues sont pour la plupart, originaires du continent américain : gommiers, acajous, mahoganys, marbris, bois rouges, courbarils, acomats, lauriers roses, châtaigniers ... recherchés pour leurs bois aux caractéristiques propres à des usages divers tels que charpentes, marqueterie, ébénisterie, construction d’ouvrages soumis aux intempéries et aux assauts des termites...
Il y a cohabitation entre ceux qui ont leurs cimes à plus de 30 m du sol, au soleil, et toutes les espèces qui luttent pour l’espace et la lumière. Des arbres plus petits aux troncs grêles s'étirent pour se faufiler vers la lumière et dans la pénombre humide, fougères arborescentes qui se déploient comme autant d'éventails et plantes aux feuillages luxuriants, palmistes, se gorgent d'eau à défaut de soleil.
Les lianes et les plantes épiphytes semblent avoir trouvé dans cet univers si comparable à nos sociétés, les formules de survie aux dépends de leurs “dominateurs”. Tous luttent, se combattent, se tolèrent et se complètent car les épiphytes ne sont pas des parasites mais des espèces qui s'appuient sur d'autres espèces en leur apportant des réserves d'eau et en préservant ainsi l’hygrométrie salutaire.
Au détour d'une trace, un bouquet géant de lourds balisiers vient jeter une poignée de couleurs dans cette large gamme de verts. Mousses, lichens, palétuviers jaunes, orchidées envoûtantes, siguine rouge ou blanche, fougères calumet, entrelacs de manglier en manteau végétal, lianes diverses qui montent vers le ciel ou descendent vers le sol pour y chercher le renouveau.
Cheminer dans cet univers en “négociant” les passages escarpés, les enchevêtrements de lianes ou quelquefois la boue procure des sensations aux ramifications subtiles et souvent contradictoires. Paix et inquiétude, détente et progressions pouvant être harassantes, pénombre dans un univers de lumière.
Si vous êtes chanceux, patient et discret, vous pourrez apercevoir le coucou-manioc ou la grive trembleuse et dans la limpidité d'une boucle de rivière, des ouassous indolents jouant avec l'ombre de plantes héliophiles.
Dans la forêt de Douville, vous pourrez sans devoir escalader des mornes abrupts, admirer les nappes de fougères, plantes épiphytes de tous types dont certaines atteignent des tailles impressionnantes. La balade, longue et apaisante, mène au départ des chutes Moreau.
Après les trépidations de la “civilisation”, la forêt tropicale est si attirante qu'on ne se lasse pas de la courtiser. quelles qu’aient été les “galères” que vous avez pu affronter, dans les massifs montagneux lors d’interminables ascensions, au corps à corps avec les éléments, vous n’aurez très vite qu'une envie… Y REVENIR.